EXPOSITION "CHINA FOOD" AVEC L'ARTISTE JEAN-PIERRE GIOVANELLI A LA GALERIE DEPARDIEU VERNISSAGE LE JEUDI 5 NOVEMBRE 2015 DE 16H A 21H
Jean-Pierre Giovanelli
“China Food”
Vernissage Jeudi 5 novembre
2015 de 16 à 21 h
Exposition jusqu’au 28 novembre
2015 Entrée l ibre
Jean-Pierre Giovanelli
CHINA FOOD
L’Occident tenu en laisse par le Dragon
par Viana Conti
En Chine, si vous détestez quelqu’un, la malédiction que vous lui adressez est : « Puisses-tu vivre dans des temps intéressants ! ». Dans notre histoire, les « temps intéressants » sont en effet des temps de troubles, de guerres et de luttes de pouvoir qui ont fait souffrir des
millions d’innocents.
Slavoj Žižek
Welcome to Interesting Times, VIth International Marx Congress, September 2010, Plenum d’ouverture Préambule
Avec l’exposition China Food/Nourriture chinoise, l’artiste français Jean-Pierre Giovanelli met en oeuvre esthétiquement, avec la poétique qui le caractérise depuis la moitié des années Soixante-dix, ces symboles, ces métaphores, ces archétypes qui sont fonctionnels à une représentation parfois ironique, parfois amère, toujours juste et frappante, de la place que la Chine occupe aujourd’hui dans le monde.
Le protagoniste de l’exposition est le riz, dont il ne faut pas rire si l’on ne veut pas pleurer pour des lentilles, surtout en Chine, car les Chinois sont les plus grands et anciens producteurs et consommateurs de riz cultivé dans l’Asie des moussons.
Il n’est ni blanc, ni noir, comme celui que l’on servait à la table de l’Empereur, ni comme celui qui a été obtenu en 1997 par de mystérieuses alchimies dans la région de Vercelli et qu’on a baptisé, de façon significative, Venere. Ni blanc ni noir, donc, mais rouge !
Rouge comme un drapeau, une idéologie, le sang, la révolution, la passion, le désir ?
C’est le public qui va s’interroger et en prendre conscience. La représentation de cet artiste, architecte, auteur d’installations multimédias, analyste des noeuds théoriques de la pensée sociopolitique contemporaine, exprime sa vision du monde par le biais d’un langage qui relève à la fois de l’ordre du visuel, du sonore, du matériel et de l’immatériel, ayant déjà appartenu, dans les années Soixante-dix, au
Collectif d’Art Sociologique – fondé en 1971 à Paris par Hervé Fischer, Fred Forest, Jean-Paul Thenot *.
Un artiste, Giovanelli, ami de Jean Baudrillard, penseur critique de la
société de consommation et de la dépendance de masse des fétiches marchands, des stéréotypes de l’image ; complice de Paul Virilio, écrivain, sociologue, urbaniste, précurseur d’une esthétique de la disparition, théoricien profond et perspicace des effets déréalisants de la vitesse sur des individus constamment suivis à la trace par des détecteurs électroniques, dépendants, infantilisés par une télécratie omniprésente et inexorable, par les angoisses du temps réel, par un futur qui ne cesse d’arriver pour ceux qui ne cessent de l’attendre ; interlocuteur de John Rajchman, qui se demande où il est possible d’identifier dans l’art contemporain ce fondement ontologique du sens et de la vision qu’on percevait dans une grande partie de l’art pré- médiatique, et encore comment il est possible de mettre en oeuvre une ré-esthétisation de la pensée qui ne se formalise pas dans un spiritisme virtuel, mais qui plonge ses racines dans cette aisthesis qui préexiste aux distinctions entre matière et immatériel, entre actuel et virtuel, entre nature et artifice.
* Jean-Paul Thénot rédige une lecture critique exhaustive de l’oeuvre de Jean-Pierre Giovanelli dans l’ouvrage Jean-Pierre Giovanelli, Una poetica dell’essere, préface de Paul Virilio, postface de John Rajchman, traduction de Viana Conti, Edizioni il Melangolo, 2006, Recco-Genova, Italie.
Une bonne lecture de l’exposition China Food pourrait se faire en adoptant la logique paracohérente à laquelle a recours le philosophe militant slovène Slavoj Žižek. Dans son analyse lacanienne de l’économie marxiste et du divorce persistant entre capitalisme et
démocratie, cet intellectuel, controversé pour ses idées radicales, se demande, avec une ironie certaine, pourquoi aujourd’hui la Chine, ancien pays communiste, est le meilleur manager du Capitalisme. Il fournit par-là à Alain Badiou, qu’il apprécie, le prétexte pour souligner sa position ambivalente par rapport à Mao Tsé-Toung.
Le Maoïsme lui-même, est toutefois marqué par le Taoïsme qui voit dans l’opposition une figure de la complémentarité, car il affirme que la contradiction est le moteur de la nature, de la société, de la pensée. Le système capitaliste de la Chine actuelle ne serait pas, dans sa vision des choses, la version exotique du capitalisme vintage occidental, mais son miroir.
De son coté, Jean-Pierre Giovanelli croit que l’émergence de la Chine, dans le globalisme contemporain, implique une privatisation du savoir collectif, l’appropriation des rentes provenant de l’exploitation des ressources naturelles. Cette réflexion mène à repenser en profondeur le binôme démocratie/capitalisme à tel point que cette mise en question entrainera des conséquences plus bouleversantes encore que l’avènement du numérique et des nanotechnologies. Ce mariage insolite entre un Capitalisme évident et un Communisme particulier s’est révélé fructueux pour la Chine, qui a utilisé l’autoritarisme même qu’elle voulait exorciser afin d’accélérer l’assouvissement du désir de l’homme-masse.
Mao, par ailleurs, dénonçait la bourgeoisie classique américaine, la
bourgeoisie russe bureaucratique et n’ignorait point que la bourgeoisie se trouve à l’intérieur de son propre parti.
Devant l’installation puissante, provocatrice, ironique et sacrale tout à la fois de China Food – titre qui laisse entendre que l’Occident pourra devenir la nourriture de la Chine – le spectateur est invité à prendre conscience de la portée du phénomène qui lui est présenté, des conflits qui existent dans un ancien pays communiste asiatique, qui domine aujourd’hui le pouvoir financier de la Planète.
Un pouvoir qui, tout en ayant accepté comme modèle de référence le capitalisme vintage occidental, d’origine étatsunienne, aujourd’hui en pleine crise, serait en train d’imaginer la manière de créer de nouveaux marchés, en sollicitant toutefois sans cesse le consommateur, au point que celui-ci confond désormais liberté et libérisme, démocratie et despotisme. La perspective de lecture d’un artiste français, comme l’est justement Jean-Pierre Giovanelli, pourrait faire référence d’abord à cette idéologie du désir qui s’est exprimée à travers la voix de Gilles Deleuze, Félix Guattari, Jean-François Lyotard.
Exposition
Voici, sur son piédestal, le grand et corpulent Bouddha chinois, en fibre de verre opalescente, dénommé Pu-Tai ou Budai, qui rigole en piétinant le drapeau des Etats-Unis qui entoure une sorte de besace pleine d’argent, de riz, de gâteaux, métaphore de l’abondance et du succès : son pouvoir et sa richesse font de lui un triomphateur incontesté. La longue marche, une toile d’un mètre et demi de hauteur sur trois de longueur, entre en résonance avec l’oeuvre précédente en instaurant un
contraste avec elle : la multitude des soldats survivants qui avance contre l’ennemi y est représentée par des grains de riz qui se colorent progressivement de rouge, un rouge qui est le symbole du Communisme, mais aussi du sang versé ; à gauche domine la figure, en noir et blanc, de Mao, coupé en deux verticalement.
Underground/Monnaie pour l’Enfer, sur un panneau en bois recouvert de satin peint, représente la monnaie accumulée par un puissant, ou de toute manière par un personnage au grand charisme, donnée en offrande, selon un rite païen archaïque, pour le passage du monde des vivants à l’outre-tombe, et censée garantir aussi l’accès à l’immortalité, au mythe.
Un des moments forts de l’exposition est représenté par la vidéo extraordinaire Mao sings the Blues!, dans laquelle la figure austère de Mao se colore d’une humanité et d’une empathie profondes, en reprenant les notes du spiritual afro-américain :
Go down, Moses/Descends, Moïse, chanté par Louis Armstrong, qui l’avait enregistré avec la Sy Oliver's Orchestra en 1957 (dont Bob Dylan nous a donné une autre version inoubliable dans son concert de Tel Aviv en 1987). L’ironie de cette vidéo-projection de Jean -Pierre Giovanelli se mue par son aspect poétique et solidaire en un contrechant à la violence de l’esclavage et de la guerre. Une autre installation exige la disponibilité d’un espace important : deux parois, formant un angle, parsemées de riz rouge, avec, en évidence, le célèbre petit livre rouge.
Au centre s’élève une pyramide de Baguettes, emblème explicite, dans l’imaginaire collectif, de la France. Suspendu au-dessus d’un sol doré miroitant, un globe de riz blanc sur lequel apparait, en projection, l’icône représentant Mao.
Thank you, Wall Street! est le titre amèrement ironique de cette oeuvre constituée d’une urne électorale en plexiglas dans la fente de laquelle est placé un tract bleu clair où Vote à Madoff – l’escroc américain auteur d’une des plus grandes fraudes financières, conçue
sur le système de Ponzi – est écrit en blanc sur fond rouge ; sur le fond de l’urne, un fer à repasser lisse et nettoie, ainsi que le ferait une ménagère diligente, un billet d’un dollar.
La vision métaphorique/symbolique/allégorique se nourrit de l’image d’une Chine qui joue un rôle primordial dans la géopolitique de la planète, d’un Empire du Dragon dont les hypothétiques pieds d’argile seraient simplement des projections d’un Occident cherchant à se rassurer tout seul. Il est certain que les intellectuels chinois, contrairement aux occidentaux, ne cessent de se confronter avec les choix et la pensée des autres dans les domaines de la politique, du social, de la finance, de la culture et de la science ; entre-temps, des bruits courent sur la fuite vers l’Orient des lingots d’or de Fort Knox.
Les moments essentiels qui marquent la vie d’un homme, en tant que sujet social, membre de la Cité, sont certifiés par des pièces d’identité, à partir de la naissance, de la formation culturelle et professionnelle, du passeport, de la carte d’électeur, de la carte d’assurance maladie, du passeport, du permis de conduire, jusqu’à l’acte de décès.
La reconnaissance d’une identité est un acte juridique qui confère une légitimité sociale à un individu et qui, à une époque de migrations, peut être tellement vitale qu’elle en devient objet de vol. Dans l’imaginaire d’un artiste tel que Giovanelli, l’identification d’une personne par le biais d’un morceau de papier déclenche une réflexion qui le mène à réaliser le cycle My life is paper/Ma vie est papier, renvoyant par-là à l’instance de la « Documentalité », traitée par le philosophe Maurizio Ferraris, comme objet social, comme inévitable acte d’inscription qui remet en jeu la question de l’ontologie, comme sphère de l’être, et de l’épistémologie, comme sphère du savoir.
L’oeuvre de Jean-Pierre Giovanelli est en effet parmi les principales de l’époque contemporaine – pour reprendre les mots de Paul Virilio – car elle travaille à la persistance d’un espace d’apparition et de disparition du sensible, elle est toujours Substantielle, il lui est impossible d’être Virtuelle, voilà la vertu qui interdit à cet artiste les délices du simulacre, ce spiritisme d’un art désormais contemporain du désastre du progrès.
Ses installations ne sont pas des oeuvres conceptuelles, ainsi que notre époque ne cesse de le répéter, mais simplement inertielles, car elles sont inscrites dans une résistance des matériaux qui est aux volumes et à la masse ce que la résistance électrique est à l’énergie.
Traduit de l’italien par Anna Giaufret
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La GALERIE DEPARDIEU A NICE
Plongé depuis trente ans dans le milieu de l'art international, Christian Depardieu dirige un espace culturel multidisciplinaire. Il s'agit d'abord d'une galerie d'art contemporain présentant les travaux d'artistes locaux et internationaux d'avant garde, choisis selon une ligne exigeante. Dans le vaste mouvement actuel d’uniformisation et de mise en réseau des cultures, certains artistes affirment leurs différences, sans toujours pouvoir les faire reconnaître. C’est pour offrir à ces individualités fortes, un espace d'exposition et de rencontre dans une ville cosmopolite comme Nice où les artistes, célèbres ou non, ont si souvent choisi de vivre et de travailler que la galerie Depardieu s’attache à montrer, dans un choix très éclectique, des artistes de notoriété nationale et internationale ainsi que des jeunes artistes travaillant sur divers médiums : peinture, sculpture, photographie, vidéo, installations, art numérique, performance…
Depuis l'ouverture en 2004, plus de soixante-dix expositions personnelles d'artistes émergents ou déjà connus y ont été organisés. Chaque vernissage réunit un public du milieu de l’art et de la culture : collectionneurs, marchands d’art, galeristes, artistes, professions libérales, chefs d’entreprises, personnalités, responsables d’institutions, journalistes, critiques d’art…
Une dynamique artistique pluridisciplinaire qui s'adresse à un monde pluriculturel.
La galerie multiplie les médiations artistiques destinées à élargir le public et à l'amener à se confronter d'avantage à l'art contemporain. Elle s'ouvre à d'autres disciplines en accueillant régulièrement des concerts de jazz, des pièces de théâtres et lectures de textes d'auteurs contemporains (Cie La Saeta), des soirées philo, des conférences, des débats, des performances, etc..
La galerie Depardieu est devenue un lieu de rendez-vous intellectuel et musical, un lieu de rencontres pour les artistes, connu des niçois mais aussi grâce à Internet en France et à l'étranger.
Actuellement "hors ses murs" la galerie retrouvera en 2013 un nouvel espace au centre de Nice. Ce centre culturel pluridisciplinaire permettra d'intensifier et de structurer notre volonté de tisser des passerelles entre ces différentes formes d'expression artistiques : musique, danse, théâtre et bien sur arts visuels, dans le but de favoriser des rencontres fructueuses entre public et artistes pour affirmer une réelle dynamique artistique.
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