Une armée russe de « mauvaise qualité » :
Réponse au Général V. Desportes

par Jean-Michel Regnier
Mon général,
J’ai pris connaissance avec beaucoup d’intérêt de vos réponses aux questions que Marc Baudriller (Bd. Voltaire) vous a posées le 22/février dernier sous le titre : « Nous basculons dans une guerre juste, ce sont les plus dangereuses ».
En revanche, je dois vous avouer qu’un paragraphe m’a interpellé :
« Il est aussi désormais avéré que l’armée russe est de mauvaise qualité, qu’elle manœuvre mal, maîtrise mal la logistique et qu’elle est mal commandée. C’est toujours une armée d’hier… »
Il se trouve que je m’intéresse au déroulement des opérations en Ukraine depuis décembre 2021, date à laquelle V. Poutine a demandé quelques garanties de sécurité en Europe. Demande rejetée par l’Occident et un des points de départ du conflit actuel.
Vous disposez sans nul doute de beaucoup plus d’informations que moi donc comment expliquez-vous que cette armée généralement présentée comme une « armée de moujiks va-nu-pieds » peu motivés, mal équipée, mal commandée, sans le soutien d’une base industrielle solide, manquant de munitions et de missiles, arrive à tenir tête, SEULE, aux forces de l’OTAN depuis plus d’un an, contrôle 20% du territoire, a « consommé » l’équivalent de deux armées ukro-otaniennes et est en passe de faire subir le même sort à la troisième ?
Si j’en crois le bilan du Mossad via un média turc, très probablement diffusé avec le feu vert d’Uncle SAM qui cherche actuellement une issue de secours pour sortir de ce conflit,
les pertes sont colossales !
Soldats/ Matériels | Russie | Ukraine | Ratio |
Avions | 23 | 302 | 13 |
Hélicoptères | 56 | 212 | 4 |
Drones | 200 | 2750 | 14 |
Chars et véhicules blindés | 889 | 6320 | 7 |
Howitzer (Systèmes d’artillerie) | 427 | 7360 | 17 |
Systèmes de défense AA | 12 | 497 | 41 |
Morts | 18 480 | 157 000 | 8.5 |
Blessés | 44 500 | 234 000 | 5.25 |
Captifs | 323 | 17 230 | 53 |
Morts – Instructeurs militaires de l’OTAN | 234 | ||
Morts – Soldats de l’OTAN Allemagne, Pologne, Lituanie… | 2458 | ||
Mercenaires Occidentaux | 5360 |
Cerise sur le gâteau, si j’ose dire, cette « piètre armée » a réussi à assécher les réserves de matériels et de munitions (artillerie et anti-chars) des trente pays de l’OTAN !
Même l’Amérique en est réduite à prélever des obus dans ses réserves stratégiques pré positionnées en Israël et en Corée du Sud !
Enfin, de l’aveu même de M. J. Stoltenberg, secrétaire général de l’OTAN, il s’avère que le complexe militaro-industriel de l’OTAN n’est pas en mesure de réagir et de reconstituer les stocks dans des délais inférieurs à deux ans, deux ans et demi.
Vous conviendrez peut-être avec moi que cette « armée de mauvaise qualité » ne se défend pas trop mal. « ON » aurait pu voir pire. J’ai donc l’impression que les analyses occidentales de la situation présentent quelques « bizarreries » :
- « On » prédisait que la Russie n’attaquerait jamais avec un rapport initial défavorable de 1/5 voire 1/6 : Elle l’a fait !
- « ON » prédisait qu’elle allait s’emparer de Kiev et envahir toute l’Ukraine : Elle ne l’a pas fait !
- « ON » prédit une grande offensive d’hiver : Elle ne l’a toujours pas lancée bien que le dégel arrive à grand pas…
- « ON » prédisait qu’elle serait défaite en une petite quinzaine : Un an après, elle a toujours l’initiative !
- « ON » prédisait un effondrement économique de la Russie : Il n’a toujours pas eu lieu et pire, le FMI pronostique un bilan à venir qui fait pâlir d’envie nombre de pays occidentaux.
- « ON » souhaitait un « regime change » : Les sondages montrent que le Peuple Russe suit son chef et adhère à ses objectifs.
Aussi, je dois avouer être quelque peu dubitatif. En revanche, j’adhère tout à fait à votre concept de « guerre juste » porteuse de tous les dangers. Les deux protagonistes en sont au même stade. Seules, peut-être, leurs motivations divergent :
- L’un se bat pour le « veau d’or » estampillé « $ »;
- L’autre se bat pour « l’Homme, ses racines et sa culture ».
À un moment ou à un autre, il faudra choisir son camp. Quant aux voies de sortie de crise, je crains que nous en soyons au stade des temps bibliques, de Sodome et Gomorrhe, à « minuit moins le quart » d’être transformés en « statues de sel » par le feu nucléaire d’une frappe US en premier suivie d’une réplique russe… ce qui serait parfaitement conforme à leurs doctrines d’emploi respectives.
Les USA l’ont déjà fait, il le referont… à moins que… quelque chose ne s’effondre. Que, par exemple, le combat cesse faute de combattants, de renforts et/ou faute de munitions ?
Pour revenir en France, j’espère de tout cœur que les états-majors de nos armées et les gouvernements à venir tireront les enseignements de ce conflit pour bâtir les armées dont la France a besoin pour reprendre sa place dans le concert des Nations. Pour l’instant, vous avez raison : Nous ne sommes pas au niveau. Nous avons deux, voire trois guerres de retard ! Il y a URGENCE car il faut garder à l’esprit qu’il faut 25 ans pour former un chef de corps.(commandant un régiment)
Mes respects mon Général.
Lcl (er) REGNIER Jean-Michel
source : Officier un jour via Strategika
Livraison de Mig-29 slovaques à Kiev :
«Tous ces équipements seront détruits»,
promet le Kremlin

Dans la foulée de la Pologne, la Slovaquie a annoncé son intention de transférer aux forces ukrainiennes des avions de combat Mig-29. Une décision qui selon Moscou ne changera pas l’issue du conflit, mais pourrait contribuer à le faire perdurer.
Après Varsovie, c’est au tour de Bratislava d’annoncer la fourniture à Kiev de chasseurs Mig-29.
«Nous remettrons 13 de nos MiG-29 à l’Ukraine» a en effet déclaré ce 17 mars à la presse Eduard Heger, le Premier ministre slovaque par intérim. Ces treize appareils correspondent à l’ensemble de la flotte de Mig-29 dont dispose la République slovaque. Retirés du service en août 2022, ces intercepteurs de conception soviétique doivent être remplacés d’ici début 2024 par des avions américains. Ce transfert est une démarche «pleinement coordonnée avec la Pologne et l’Ukraine» a précisé Eduard Heger.
«On a l’impression que ces pays ne font que recycler de cette manière du vieux matériel dont ils ne veulent plus» a réagi Dmitri Peskov, porte-parole de la présidence russe, qui a estimé que «tous ces équipements seront détruits» au cours de la campagne russe en Ukraine. «La fourniture de ce matériel militaire, comme nous l’avons déjà dit à plusieurs reprises, ne peut pas changer l’issue de l’opération militaire spéciale» a-t-il réitéré, avant d’ajouter «mais elle pourrait entraîner de nouveaux malheurs pour l’Ukraine elle-même et son peuple.»
La position de Washington pour l’heure inchangée
La veille de cette promesse de don slovaque, le président polonais Andrzej Duda avait annoncé que son pays livrerait au régime ukrainien «dans les jours à venir» un «premier lot» de quatre Mig-29. Une telle livraison – officielle – d’avions de combat de quatrième génération constituerait une première depuis l’éclatement du conflit en février 2022.
«Il s’agit d’un autre exemple de la façon dont certains Etats membres de l’Organisation de l’Atlantique Nord, notamment la Pologne, s’impliquent de plus en plus directement dans le conflit» a pour sa part souligné Dmitri Peskov.
Varsovie, au premier rang des soutiens militaires de Kiev, se targue d’avoir constitué une «coalition» afin de fournir des Mig-29 aux forces ukrainiennes. Dès les premiers jours du conflit, les autorités polonaises s’étaient dites prêtes à mettre à disposition des Etats-Unis l’ensemble de leurs Mig-29 afin qu’ils soient livrés aux forces ukrainiennes. Un rôle d’intermédiaire auquel s’est pour l’heure refusé Washington.
Interrogé sur la décision polonaise de livrer à l’Ukraine des avions de combat, John Kirby, un porte-parole de la Maison Blanche a déclaré à la presse qu’il s’agissait d’une «décision souveraine» et que «cela ne change rien» à la ligne de Joe Biden. Pour l’heure, le président américain n’a pas cédé aux demandes de Kiev de lui fournir des chasseurs-bombardiers F-16.
source : RT France
Analyse des évènements spéciaux,
du Reaper aux bombardiers
et aux frappes Kinzhal

par Simplicius
Ce que nous savons maintenant, cependant, c’est que le MQ-9 Reaper est issu de l’un des blocs les plus récents et les plus avancés, équipé d’une suite électronique très avancée/sensible « Gorgon’s Stare ».
Avec le Gorgon Stare, le drone disposait d’une variété de capteurs qui pouvaient tout faire, depuis l’enregistrement de séquences vidéo précises, de séquences thermiques, d’instantanés radar à synthèse d’ouverture de bases/actifs russes, d’enregistrement d’émissions électroniques et de données de signal du QG de commandement russe (C3), les sites radar et leurs positions.
Le Gorgon Stare lui-même, si vous lisez l’article wiki fourni, est géré par un programme DARPA AI sournois appelé Mind’s Eye, qui fait tout ce que j’ai décrit une fois dans cet article – essentiellement : analyse « intelligente » du réseau neuronal des données au sol enregistrées où l’IA peut suivre/localiser/évaluer/transmettre des cibles par elle-même, tout en les géolocalisant avec diverses métadonnées, etc.
Avec ces outils, le drone est censé transmettre plusieurs gigaoctets de données par minute
« La mission d’espionnage ici n’est même pas visible à 100%, mais à 1000%. Il s’agit d’une reconnaissance tactique – une caméra vidéo haute résolution assez puissante et un équipement qui vous permet d’enregistrer les fréquences des stations de radio, des stations de guidage de missiles, des stations radar, de déterminer l’emplacement des systèmes de défense aérienne, des systèmes de défense aérienne, de déterminer l’emplacement du quartier général, postes de commandement et, grâce à la reconnaissance visuelle, prendre des photos d’une résolution suffisamment élevée », a expliqué Knutov. »
Mettre la main sur ce Gorgon serait une aubaine pour la Russie. C’est pourquoi ils ont maintenant positionné leurs navires et, au moment d’écrire ces lignes, se préparent à soulever le drone à une profondeur de 900 m.
« Drone américain MQ-9 trouvé à une profondeur de 900 mètres. Au-dessus, le devoir des navires de la flotte de la mer Noire a été établi afin de ne laisser personne s’approcher du site de l’accident. La question de son ascension est en train d’être résolue.
Il y a un navire de la flotte de la mer Noire qui est capable de le faire – le légendaire « Kommuna » construit en 1913. Reconstruit à plusieurs reprises et ayant un énorme bilan de travaux sous-marins (y compris la récupération de plusieurs sous-marins, ainsi que des avions et navires), il dispose de véhicules hauturiers capables d’opérer jusqu’à 1 km de profondeur.
Soit dit en passant, Kommuna a de l’expérience dans le levage d’équipements étrangers. En 1928, il a soulevé le sous-marin britannique coulé L-55 dans la Baltique, qui a été détruit par des mines alors qu’il échappait aux destroyers soviétiques. »
Les États-Unis ont affirmé avoir effectué un « effacement à distance » des données du Reaper.
Ceci est discutable pour diverses raisons.
Premièrement, effacer les données une seule fois ne les supprimera jamais, les spécialistes de la récupération, en particulier les spécialistes russes qui sont probablement les meilleurs au monde, peuvent facilement récupérer les données. Mais la suppression complète des données industrielles nécessite de nombreuses passes récurrentes d’écritures de données sur la puce mémoire pour qu’elle soit vraiment irrécupérable. Cela prend du temps – du temps que le drone n’a probablement pas eu alors qu’il descendait dans la mer, à quel point ses batteries auraient été inondées et probablement toute opération de « nettoyage des données » arrêtée.
Ainsi, le verdict est le suivant : les données sont probablement récupérables à moins que les États-Unis n’aient un dispositif spécial d’autodestruction détonant installé sur la puce de données
Pour sauver la face, John Kirby a tenté de prétendre que les USA avaient encore la capacité de récupérer le drone. Lorsqu’on lui a demandé lors d’une conférence de presse si le drone pouvait être récupéré, il a cerné, hésité et temporisé, déclarant que les États-Unis « n’étaient pas sûrs de pouvoir le faire » dans cette région et à cette profondeur, cachant le fait que la flotte russe s’était déjà positionnée. elle-même entièrement au-dessus du site. Les États-Unis ne sont même pas autorisés à amener des navires de guerre à travers le Bosphore conformément à la Convention de Montreux.
En parlant de cela, une bizarrerie très intrigante mérite d’être mentionnée. Pendant les nombreux mois que les États-Unis ont fait voler leurs drones au-dessus de la mer Noire, ils ont toujours étrangement dû « faire le tour » du territoire turc.
Remarquez comment la trajectoire de vol directe est toujours interrompue par un réacheminement nécessaire vers le nord en Bulgarie, juste autour de la pointe du territoire turc près du Bosphore.
Il est clair qu’Erdogan n’autorise pas les moyens de guerre américains à contourner son territoire en route pour surveiller le SMO russe.
Passons maintenant à d’autres choses.
Une mise à jour concernant le dernier rapport sur les prétendues frappes russes de Kinzhal sur les actifs de l’OTAN. Il y a des chances que l’incident du drone soit lié.
Comme d’autres l’ont vivement noté, il y a une série d’événements étrangement liés qui ont commencé avec les très grandes frappes de missiles de la Russie la semaine dernière. Il y avait quelque chose de particulièrement spécial dans ces frappes puisque plusieurs ministres/sources ukrainiens ont fait référence aux frappes avec des mots inhabituellement forts, certains déclarant qu’il s’agissait des frappes les plus puissantes depuis le début du SMO. Même Zelensky l’a qualifié de « signal très fort pour l’Ukraine ».
Ensuite, comme expliqué dans notre dernier rapport , nous avons appris que 6 Kinzhals avaient été utilisés et qu’un QG de l’OTAN avait peut-être été touché avec plus de 40 morts.
Ce qui est intrigant, c’est que ces grèves ont eu lieu le 10 mars. Immédiatement après eux le 12 mars, les États-Unis ont envoyé un message extrêmement provocateur en simulant un bombardement nucléaire sur Saint-Pétersbourg lorsqu’ils ont envoyé un bombardier B-52 directement vers Saint-Petersbourg dans une manœuvre sans précédent.
Le bombardier à capacité nucléaire a coupé juste avant la frontière maritime russe, jusqu’en Estonie. Pourquoi enverraient-ils un message aussi direct et évident juste après les attentats du 10 mars ? Il me semble que ces 6 Kinzhals confirmés n’ont pas été envoyés en vain, ou contre des cibles sans importance. Cela confirme probablement que plus de 40 officiers de l’OTAN/CIA ont été en fait liquidés, comme le suggèrent les rapports, et l’État profond américain est extrêmement dérangé par cela.
« Le bombardier stratégique B-52H Stratofortress de l’US Air Force, capable de transporter des armes nucléaires, a développé la formation pour lancer des missiles sur le territoire russe, selon Military Observer.
Il y a environ deux heures, l’avion est entré dans une position de lancement de missiles à Saint-Pétersbourg, dans la région de l’île de Gotland, située à une distance d’environ 200 km de la capitale du nord.
Après cette manœuvre, le bombardier américain a effectué un virage serré et est parti en direction de l’Estonie. L’avion entre maintenant dans l’espace aérien lituanien, a indiqué la source. »
Seulement un jour après cela, ils envoient soudainement l’un de leurs drones les plus avancés directement vers la Crimée/Sébastopol dans un autre « message » extrêmement agressif.
Ils n’ont jamais pris une telle trajectoire auparavant, Et en darkmode avec les transpondeurs éteints. Une fois de plus, il est clair que les frappes du 10 mars les ont vraiment grillés et qu’ils sont désespérés d’escalader ou de frapper comme un animal blessé.
L’explication logique est qu’il y avait des accords « tacites » ou des lignes rouges entre les deux grandes puissances.
Et la Russie a finalement franchi cette ligne rouge avec la sextuple attaque sournoise de Kinzhal.
source : Simplicius the Thinker via Bruno Bertez
Peut-on arrêter de faire semblant ?
Où sont les adultes lorsqu’il
s’agit de l’Ukraine ?

par Larry Johnson
Un certain nombre de questions restent sans réponse concernant l’incident qui a coûté la vie au MQ9 Predator au large de la Crimée mardi dernier. Commençons par les faits :
1. Le drone MQ9 effectuait une mission de renseignement, de surveillance et de reconnaissance dans l’espace aérien international au large de la Crimée.
2. Le MQ9 a éteint son transpondeur d’identification, ami ou ennemi (IFF).
3. Les systèmes de défense aérienne russes suivaient le drone.
4. Des chasseurs à réaction russes ont été mobilisés pour intercepter le drone.
5. Les États-Unis et l’OTAN font voler des drones le long de la côte de Crimée depuis plus d’un an.
6. Le drone a été abattu sans qu’aucun coup de feu ne soit tiré par les avions de combat russes.
Jusqu’à présent, les États-Unis et l’armée russe s’en tiennent à la même version : l’un des avions a accidentellement accroché l’hélice du drone, ce qui a provoqué son écrasement.
Nous sommes en plein théâtre Kabuki. Les États-Unis insistent sur le fait que ce drone était inoffensif, qu’il ne faisait que s’occuper de ses affaires, et qu’un pilote russe incompétent n’a pas réussi à contrôler son avion. La Russie insiste sur le fait qu’il n’y a pas eu de contact avec le drone et affirme que le drone a viré brusquement et est tombé du ciel.
Les commentaires du ministre russe des Affaires étrangères, Lavrov, sur l’incident montrent clairement que la Russie considérait ce drone comme une menace pour sa sécurité :
« Nos militaires ont fait une évaluation qui a été reproduite par notre ambassadeur à Washington, Alexander Antonov. Il a expliqué, notamment à des journalistes, comment nous considérons cet incident du point de vue de la sécurité mondiale. Il a été invité au Département d’État des États-Unis, où on lui a présenté des affirmations totalement infondées concernant la violation de la liberté de l’aéronautique.
Vous avez entendu des représentants du Pentagone et de l’état-major interarmées déclarer que les États-Unis continueront à voler où bon leur semble « conformément au droit international ». » (https://t.me/DonbassDevushka/48682)
L’ambassadeur de Russie à Washington a réagi vivement aux appels lancés par des responsables américains, en particulier par le sénateur Lindsey Graham, pour qu’ils abattent un avion russe ayant interféré avec un drone américain :
« « Attaquer intentionnellement un avion russe dans un espace aérien neutre n’est pas seulement un crime au regard du droit international, c’est aussi une déclaration de guerre ouverte à la plus grande puissance nucléaire », a-t-il averti. « Un affrontement armé entre la Russie et les États-Unis serait radicalement différent d’une guerre par procuration que les États-Unis mènent à distance contre nous en Ukraine. Le Capitole est-il prêt à exposer les citoyens américains et la communauté internationale au risque d’une guerre nucléaire totale ? Répondez, cher sénateur ! » (https://t.me/Slavyangrad/37513)
Si vous regardez attentivement la photo du MQ9 Reaper ci-dessus, vous verrez qu’il est presque impossible pour un jet russe de simplement « frapper » l’hélice sans causer d’autres dommages au drone. Ce type d’impact aurait fait basculer le drone, probablement d’un bout à l’autre.
Les États-Unis affirment disposer d’une vidéo de l’incident. C’est vrai ? Alors pourquoi n’a-t-elle pas été diffusée ? Si la vidéo confirme la version américaine de l’incident, il s’agirait d’un coup d’éclat en matière de relations publiques. Elle mettrait en évidence le fait que l’ambassadeur russe a menti pour son pays (cela ne serait pas propre à la Russie, tous les ambassadeurs de tous les pays sont connus pour mentir de temps en temps). La Russie dispose également d’une vidéo des deux avions impliqués dans l’interception. Pourquoi cette vidéo n’est-elle pas diffusée ?
Une explication possible est que les Russes ont utilisé une sorte de système d’arme électronique qui a mis le drone hors d’état de nuire et l’a fait s’écraser. La Russie ne veut pas diffuser d’images montrant que le drone a été neutralisé.
Je suis convaincu que cette action a été planifiée à l’avance par la Russie. Elle a choisi le moment et l’endroit pour abattre le drone parce que ses navires de récupération étaient déjà sur place pour ramasser l’épave. Si la Russie récupère les capteurs de renseignements de cet oiseau, elle sera en mesure de les analyser et de mettre au point des contre-mesures pour entraver les futures collectes.
Je pense que les États-Unis et l’OTAN vont repenser leur utilisation des drones dans la zone d’opérations de la mer Noire. La Russie a clairement indiqué qu’elle n’autoriserait pas la collecte sans entrave de renseignements pouvant être utilisés pour la planification et les opérations contre les forces russes.
Il ne s’agit pas d’un jeu vidéo. La Russie, de son point de vue, défend sa patrie. Comme je l’ai mentionné dans mon article précédent, comment réagirions-nous si des drones russes volaient le long de la frontière entre le Mexique et les États-Unis, recueillant des renseignements sur le déploiement des forces frontalières américaines et transmettant ces informations aux cartels de la drogue mexicains, qui les utiliseraient à leur tour pour inonder de migrants illégaux les points faibles de notre frontière ? Les Américains seraient à juste titre scandalisés. Alors pourquoi pensons-nous que nous pouvons faire ce que nous faisons et attendre des Russes qu’ils se couchent comme des chiens battus et ne fassent rien ?
C’est la raison du titre de cet article. Il faut que des adultes à Washington fassent taire toutes les menaces belliqueuses et s’efforcent de désamorcer cette confrontation avec la Russie. Si nous ne le faisons pas, la situation se terminera mal pour les États-Unis.
source : A Son of The New American Revolution
traduction Réseau International
L’Ukraine et la crise de la politique
étrangère de l’Occident

par Ralph Bosshard
Après l’intégration – ou plutôt, selon les Occidentaux, l’annexion – de la Crimée par la Fédération de Russie en 2014, le mot d’ordre de la politique étrangère occidentale était « on ne revient pas au business as usual ». Depuis le 24 février, la formule s’est transformée en « No Business at all » et l’Occident menace de sanctions tout état ou toute personne qui entretiendrait malgré tout des relations avec la Russie. Les événements de ces derniers mois laissent toutefois planer le doute sur la capacité de l’Occident à imposer au monde son point de vue. En effet, l’Europe occidentale est en perte de vitesse et va devoir apprendre à vivre avec son déplaisant voisin de l’Est.
En politique étrangère, les instruments de lutte diplomatiques et économiques de l’Occident se sont avérés insuffisants contre la Russie. En outre, un grand nombre d’états contestent le leadership revendiqué par le président américain Joe Biden lors de la campagne électorale. Une résistance se fait jour après trois décennies passées à décréter qu’un pays qui déplaît est un état-voyou et mérite des sanctions. La revendication d’un monde multipolaire constitue une réponse à la domination exercée par l’Occident depuis la chute de l’Union soviétique.
L’Occident en mal d’arguments
L’indignation de l’Occident face à l’intervention russe en Ukraine peut s’expliquer en partie par le fait que les Russes ont utilisé, dans le cas de la Crimée et du Donbass, les mêmes arguments que ceux invoqués par l’Occident pour justifier ses diverses interventions au cours des trois dernières décennies : cette argumentation repose notamment sur le droit à la sécession revendiqué au nom des populations russophones du sud et de l’est de l’Ukraine par opposition à celui exprimé par les Albanais du Kosovo dans l’ex-Yougoslavie1. À cela s’ajoute la notion de responsabilité de protection (Responsibility to Protect) ou d’intervention humanitaire, qui avait également été avancée dans le contexte du Kosovo, mais aussi de l’intervention occidentale en Libye2.
La faiblesse de l’argumentation occidentale est accentuée par le fait que dans le cas de la Serbie en 1999 et de l’Irak en 2003, les justifications avancées pour l’intervention militaire se sont ultérieurement révélées sans fondement. L’existence du « Plan fer à cheval » demeure controversée et la thèse des armes de destruction massive irakiennes s’est avérée être un mensonge3. Dans le domaine de la sécurité, l’Occident s’est également vu tendre un miroir réfléchissant. Depuis février de cette année, la Russie argue de la nécessité d’une attaque préemptive contre l’Ukraine, au motif de parer à d’imminentes frappes ukrainiennes dirigées contre les républiques populaires sécessionnistes de Donetsk et de Lougansk. C’est en 2002 que le terme d’attaque préemptive a été utilisé pour la première fois par le président américain de l’époque, George W. Bush, devant le Congrès. Moscou a toujours justifié son opposition à l’élargissement de l’OTAN vers l’Est en invoquant l’indivisibilité de la sécurité, stipulée dans le document final d’Helsinki4. Bien entendu, l’Occident réfute toute argumentation de la Russie : ces événements n’ont rien à voir les uns avec les autres. Cette affirmation peut satisfaire une partie des Occidentaux. Il existe cependant des tenants d’une conception égalitaire du droit international, plus enclins à adopter le point de vue russe. Il s’agit notamment de pays qui ont déjà été victimes d’interventions occidentales ou qui se sentent menacés. Il n’est pas question ici de commenter ou même d’évaluer les arguments des parties en présence. Décider aujourd’hui de qui croit quoi relève plus souvent de convictions idéologiques que de l’analyse objective des faits.
Pour la dixième fois déjà, le gouvernement russe a organisé à la mi-août à Moscou sa traditionnelle conférence sur la sécurité, bien évidemment assombrie par la guerre en Ukraine. À cet égard, le tableau des origines des intervenants à cette conférence est éloquent5 : la majorité des pays d’Asie et d’Amérique latine y ont participé, ainsi que la moitié des pays africains. La participation de certains pays d’Europe occidentale est à cet égard intéressante, bien que du côté américain, on ait certainement tout fait, comme les années précédentes, pour l’empêcher. L’affluence de participants venus du monde entier est d’autant plus significative qu’elle survient alors que la Russie est activement engagée dans la guerre. La Russie est et reste un acteur important de la politique mondiale et même les pays qui ne cautionnent pas totalement les agissements de la Russie en Ukraine souhaitent rester en contact avec Moscou. L’Occident et plus particulièrement l’Europe perdent par contre de leur influence. La Russie peut donc se demander pourquoi elle devrait se soumettre à la volonté d’une Europe dont l’importance est en baisse.
Économie et géoéconomie
En 2015, lors d’un séminaire au George C. Marshall Center, l’attaché allemand à la Défense alors en poste en Russie, le brigadier-général Schwalb, montrant l’image d’une peau d’ours sur un mur, fit remarquer que l’Occident pouvait clouer la Russie au mur sans délai rien qu’en recourant aux moyens économiques6. Sept ans plus tard, son pronostic ne s’est toujours pas réalisé. C’est sans doute grâce à cette même certitude de la supériorité économique absolue de l’Occident que l’on a pu prédire, jusqu’en février dernier, que la Russie n’attaquerait pas l’Ukraine. En ce qui concerne l’efficacité de la géoéconomie, il faut dire que ces dernières années, l’Occident s’est considérablement surestimé.
Compte tenu de l’énorme impact économique et du risque politique d’une guerre, la géoéconomie devrait, selon les théories d’Edward N. Luttwak, remplacer la guerre conventionnelle7. La mise en œuvre d’une stratégie géoéconomique prometteuse s’appuie obligatoirement sur une économie forte et performante. Jusqu’à présent, l’économie russe semble avoir eu l’envergure et la cohérence permettant de résister à la géoéconomie occidentale. Dès lors qu’un des protagonistes souhaite élargir sa base économique, cela peut aller jusqu’à impliquer dans un conflit des États jusque-là non concernés – et notamment la Suisse, l’un des grands acteurs de l’économie mondiale. En mars dernier, la joie des commentateurs occidentaux consécutive à la dépréciation de la devise russe a été de courte durée8. Manifestement, la banque centrale russe est alors intervenue avec une grande efficacité et a rapidement stabilisé le rouble. Même la soi-disant bombe atomique économique, c’est-à-dire l’exclusion de la Russie du système SWIFT, n’a pas entraîné l’effondrement du système économique et financier russe.
Dans le cas de la Russie, les sanctions économiques et politiques n’ont pas eu l’effet escompté. Si d’autres conflits éclatent à l’avenir avec des pays qui bénéficient du soutien de la Russie, de la Chine ou d’autres outsiders de la politique mondiale, l’Occident devra avoir recours à des moyens militaires plus rapidement que par le passé. Le déclin de l’Occident passera par la violence.
La crise des années 90 en Russie
On entend souvent dire que Vladimir Poutine veut restaurer l’Union soviétique. Un retour au communisme n’est certainement pas envisageable pour de nombreux secteurs de la société russe. Le Parti communiste russe peine à réunir une majorité et son électorat vieillit. Mais un retour à un capitalisme sauvage, tel qu’on l’a vu en pratique du temps du libéralisme pratiqué sous le gouvernement de Boris Eltsine n’est clairement plus d’actualité. Le souvenir de la crise du rouble est encore trop présent dans les mémoires, lorsque la dramatique chute du rouble a privé de nombreuses personnes des économies de toute une vie de travail. Cela a été le cas non seulement pour bien des gens en Russie, mais aussi en Ukraine et dans d’autres républiques de l’ex-Union soviétique. Les figures de proue de l’expérience libérale, connues sous le nom de «jeunes réformateurs», sont aujourd’hui très impopulaires en Russie. Il s’agit notamment de Egor Gaïdar, de Boris Nemtsov, de Sergueï Kiriyenko, de Anatoli Tchoubaïs et de bien d’autres9.
Ceux qui veulent ignorer ce qui s’est passé en Russie dans les années 90 ne pourront pas comprendre la Russie d’aujourd’hui. La génération qui garde en mémoire les désastreuses années 90 s’opposera par tous les moyens à ce que la Russie redevienne ce qu’elle était alors : un pays qui bradait ses matières premières à des prix dérisoires, tout comme les unités de production correspondantes, mais qui n’avait par ailleurs rien à dire sur la scène politique internationale. C’est pourquoi le général Ben Hodges, l’ancien commandant en chef des forces américaines en Europe, s’est montré particulièrement maladroit lorsqu’il a déclaré, à l’occasion d’une manifestation de l’OSCE à Vienne, qu’il souhaitait revoir une coopération avec la Russie semblable à celle des années 9010 Ce genre de coopération est voué au rejet.
Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui, dans l’ancienne Union soviétique, souffrent de voir les Russes se battre contre les Ukrainiens, les Azerbaïdjanais contre les Arméniens, les Tadjiks contre les Kirghizes, etc. C’est précisément dans l’optique de résoudre les conflits dans cette région que la Communauté des États indépendants a été créée en 1991, mais elle fait malheureusement aujourd’hui figure de parent pauvre, de destination de fin de carrière pour les diplomates vétérans. Mais l’Europe s’est engagée dans une confrontation avec un pays bien décidé à ne pas se soumettre une nouvelle fois. Il faut donc trouver un nouveau modus vivendi.
Une Europe divisée sur la communauté des valeurs
La communauté de valeurs que l’Europe considère comme étant la sienne est divisée et l’UE aura du mal à rester unie. C’est précisément dans les questions relatives à l’intégration du genre que se creuse le fossé entre l’Est et l’Ouest : Certains Etats d’Europe de l’Est ne sont pas disposés à suivre cette tendance sans hésitation11. Les rapports idéologiques de la guerre froide se trouvent alors inversés : Alors qu’à l’époque, le communisme à la soviétique était hors de question pour les pays d’Europe de l’Ouest, l’opinion publique de plusieurs pays occidentaux penche désormais plutôt en faveur de l’idéologie du prétendu adversaire russe. En effet, dans plusieurs pays d’Europe de l’Est, les « nouvelles valeurs » ne font pas plus l’unanimité ici qu’en Russie. En promouvant agressivement leur idéologie LGBTI+, les fanatiques woke d’Europe de l’Ouest et du Nord pourraient forcer les gouvernements d’Europe de l’Est à se prononcer clairement et à diviser leur propre communauté de valeurs.
L’Europe a jeté l’éponge devant une société bien décidée à préserver son Way of Life. À cela s’ajoute le fait qu’en Russie, on considère que les Européens sont incapables de défendre leurs valeurs. D’un autre côté, la Russie n’est plus un goulag, comme à l’époque de la répression de Staline. Les citoyens russes peuvent entrer et sortir librement du pays. Chaque année, on compte en Russie un solde positif de plus d’un million d’immigrants par rapport aux émigrants quittant le pays12. Cela crée d’une part un véritable exutoire social et montre d’autre part que la vie en Russie n’est pas aussi épouvantable qu’on veut parfois nous le faire croire.
Le handicap géostratégique de la Russie
L’importance globale de l’agriculture russe a clairement été mise en évidence dans le cadre du conflit ukrainien. En Russie, le triangle Saint-Pétersbourg – Irkoutsk – Rostov-sur-le-Don est propice à l’agriculture. Cela coïncide également avec la répartition de la population en Russie : Plus de 80% de la population russe vit dans la partie européenne du pays, à savoir dans le quadrilatère Saint-Pétersbourg – Ekaterinbourg – Tcheliabinsk – Rostov-sur-le-Don13. La majeure partie de la population de la Sibérie vit dans le sud de cette région.
Et c’est précisément dans les plaines d’Europe de l’Est que se trouve le passage ouvert vers le territoire russe. La plupart des autres régions frontalières ne sont pas adaptées au déploiement de puissantes unités de forces conventionnelles. Le territoire russe n’est en fait accessible que dans les pays baltes et la plaine d’Europe de l’Est. Un second passage d’accès se situe en Extrême-Orient: à l’est de la ligne Heihe-Tengchong en Chine, il y aurait des possibilités d’attaque contre le territoire russe. Mais qui aiderait la Russie à défendre sa région d’Extrême-Orient si elle entrait en confrontation avec la Chine ? La Russie a bien conscience de son désavantage géostratégique. Le sentiment latent de vulnérabilité qu’entretient l’élite politique russe provient de ce désavantage.
La réorganisation de l’Europe de l’Est
Avec l’effondrement de l’Union soviétique et l’indépendance de ses républiques, des millions de personnes se sont soudainement retrouvées après 1991 dans un pays dont elles ne maîtrisaient pas la langue officielle et ont reçu des passeports d’un état pour lequel elles éprouvaient une estime très modérée. Ce problème n’a toujours pas été résolu. Le Kazakhstan et la Biélorussie sont tout de même parvenus à reconnaître deux langues officielles. La Russie et le Kazakhstan sont les seuls pays de l’ancienne Union soviétique à se considérer comme un empire multiethnique. Tous les autres mènent une politique de nationalisme plus ou moins marquée. Le conflit qui sévit en Ukraine pourrait facilement se reproduire ailleurs.
En fait, même dans le cas de l’Ukraine, l’introduction du russe comme deuxième langue officielle ne constituerait pas une exigence inacceptable. La Belgique, la Finlande, l’Irlande, le Luxembourg et la Suisse utilisent également plusieurs langues officielles, sans que l’unité de l’État en soit pour autant menacée. Mais la majorité des pays membres de l’UE sont unilingues et nombre d’entre eux ont eu par le passé des difficultés à gérer leurs minorités nationales14. Jusqu’à présent, l’UE a fait bien peu pour protéger les droits de la minorité russe dans les républiques baltes15. L’autodétermination linguistique des régions russophones de l’est de l’Ukraine, telle qu’elle était formulée dans le paquet de mesures adopté lors des accords de Minsk, n’a donc jamais, en plus de huit ans, été mise en œuvre.
L’autre élément qui a fait échouer l’application des accords de Minsk est l’article sur la fédéralisation du pays. Cette notion a été interprétée par les politiciens et les oligarques ukrainiens comme un passe-droit pour la création de petits royaumes. L’oligarque Rinat Akhmetov s’est probablement félicité que le Donbass soit devenu ce genre de royaume, et Ihor Kolomojskyj avait sans doute lui aussi des intentions similaires pour sa ville natale de Dnipro/Dniepropetrovsk. En compagnie de son gouverneur désigné Gennadyi Korban à Dnipro, tout comme Evgeniy Muraev et Vadim Rabinovich à Kharkov, ils sont de potentiels candidats au trône. Ce sont éventuellement là des personnalités qui, à moyen terme, feront sortir les oblasts de Dnipro et de Kharkov de la voie sécessionniste.
Dans l’ensemble, l’Ukraine sortira de la guerre actuelle affaiblie sur le plan financier, économique, démographique et infrastructurel. C’était sans doute là l’un des objectifs de la guerre dans son ensemble ainsi que l’arrière-plan de la déclaration du président russe Poutine selon laquelle il s’agissait de garantir la sécurité militaire de la Russie sur une période de deux à trois générations.
Trafic d’armes et stabilité
En ce qui concerne la corruption et le trafic d’armes, les rapports selon lesquels 60 à 70% des armes livrées par l’Occident disparaissent dans le bourbier de la corruption ukrainienne sont vraisemblablement dignes de foi. En septembre 2014, Arsen Avakov, alors ministre de l’Intérieur, a littéralement fait « sauter » une délégation de l’OSCE à Kiev16. A l’époque, l’OSCE s’était inquiétée de la fourniture d’armements, échappant à tout contrôle et provenant de toutes sortes de dépôts, aux formations de volontaires nouvellement créées en Ukraine ; elle avait donc proposé au gouvernement ukrainien la mise en place d’un logiciel permettant leur enregistrement. Bien que cette méthode ait déjà fait ses preuves dans d’autres pays, le ministère de l’Intérieur ukrainien se montra peu intéressé. On peut spéculer sur les raisons de cette attitude. À l’époque, les bataillons de volontaires encore en formation « achetaient » leur équipement. Les multiples éléments d’uniforme occidentaux qu’on pouvait voir dans l’est de l’Ukraine ces années-là n’en étaient qu’une infime partie.
Cette absence de contrôle des armements n’était peut-être alors pas involontaire. Or, on a assisté ces derniers mois à un afflux sans précédent d’armes et de munitions en Ukraine, et il est à craindre qu’il n’y ait guère plus de contrôle sur leur destination. Toutefois, il ne s’agit plus aujourd’hui uniquement d’armes de poing, mais d’armes lourdes conçues pour contrer les chars et les avions. L’Europe pourrait très bientôt être le théâtre d’attentats perpétrés avec des armes de guerre occidentales. Les extrémistes politiques et le crime organisé peuvent les utiliser à leurs propres fins dans un avenir proche et déstabiliser toute la moitié orientale de l’Europe. Les pays d’Europe de l’Est devront payer le prix de cette politique irréfléchie.
Conclusion
Aujourd’hui, l’Occident n’est plus en mesure de rallier d’autres pays à ses vues, ni même de les forcer à les adopter. Le bloc ne peut actuellement maintenir sa cohésion qu’en jouant sur la peur qu’inspire la Russie. Par ailleurs, un certain consensus prévaut en Russie pour éviter toute nouvelle subordination à l’Occident, qui ne jouit de toute façon pas d’un grand prestige. Aucun revirement de la politique russe ne se profile à l’horizon. Il n’est pas encore certain que l’UE puisse financer la reconstruction de l’Ukraine, le développement de l’Europe de l’Est et une vague de réarmement. Ce qui est douteux au vu de l’actuel contexte économique.
Au cours des années, voire des décennies à venir, la géopolitique occidentale va contraindre la Russie à chercher à déstabiliser ses voisins d’Europe de l’Est afin d’éviter qu’ils ne constituent une base solide pour une attaque dirigée contre elle. L’Europe de l’Est, en proie à une corruption rampante, offre un terrain favorable à ce type de projet et, disposant d’un armement conséquent, également les moyens. La Russie est suffisamment intégrée dans la communauté internationale pour pouvoir se permettre de mener une politique agressive à l’égard de l’Europe et les sanctions ne pourront guère l’en dissuader. Parallèlement, la politique étrangère occidentale devient plus agressive, voire presque militariste.
L’Ukraine ainsi que les tenants d’une ligne dure en Occident freineront toute tentative d’établir un modus vivendi avec la Russie. L’Occident ne sera pas en mesure d’imposer les modalités de ce dialogue.
source : Tribune Diplomatique Internationale
- Voir à ce sujet Hans Rudolf Fuhrer : Quel a été l’élément déclencheur de l’« opération spéciale » russe – le plan d’attaque ukraiien ou l’impéerialisme russe ? dans Horizons et débats n°19/20, à consulter en ligne sur : https://www.zeit-fragen.ch/20-september-2022/was-war-der-ausloeser-der-russischen-spezialoperation.
- Voir la Homepage du Global Center for the Responsibility to Protect, à consulter en ligne sur : https://www.globalr2p.org/what-is-The-Responsibility-to-Protect-known,cleansing-and-crimes-against-humanity.
- Sur le sujet en général, voir Christian Schaller : Gibt es eine « Responsibility to Protect » ? sur Bundeszentrale für politische Bildung, 31/10/2008, à consulter en ligne sur : https://www.bpb.de/gibt-es-eine-responsibility-to-protect.
- Voir notamment, parmi les nombreuses publications sur le sujet, Serge Halimi, Pierre Rimbert : « Le plus gros bobard de la fin du XXe siècle – La légende du Plan fer à cheval » dans Le Monde Diplomatique, 11/04/19, à consulter en ligne sur : https://monde-diplomatique.de/artikel/!5584546 et « 20 Jahre Nato-Angriff auf Serbien, örtlich gebombt » dans TAZ, 24/03/19, en ligne sous : https://taz.de/20-Jahre-Nato-Angriff-auf-Serbien. Sur les mensonges de Colin Powell, alors secrétaire d’État américain, au Conseil de sécurité de l’ONU : Christoph Burgmer : « Auf Lügen gebaut », sur Deutschlandfunk 05/02/13, à consulter en ligne sur : https://www.deutschlandfunk.de/auf-luegen-gebaut, Rieke Havertz: Dieser eine Moment, sur : Zeit online, 18/10/21, à consulter en ligne sur : https://www.zeit.de/2021-10/colin-powell-tod-ehemaliger-us-aussenminister-nachruf-weisses-haekchen-augen-erhobene-haende, Katta Kottra : Lügen im Irakkrieg, Die langen Nasen von Powell & Co dans Süddeutsche Zeitung, 18/03/08, à consulter en ligne sur : https://www.sueddeutsche.de/luegen-im-irakkrieg-die-langen-nasen-von-powell-co.
- L’Acte final de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe d’Helsinki de 1975 est disponible en ligne à l’adresse suivante : https://www.osce.org/documents/6/e/39503.pdf .
- Voir la liste des intervenants sur le site du ministère russe de la défense à l’adresse suivante: https://eng.mil.ru/en/mcis/speeches.
- L’auteur de l’article a lui-même participé à ce séminaire.
- Sur Luttwak et la géoéconomie, voir: From Geopolitics to Geo-Economics, Logic of Conflict, Grammar of Commerce, 1990 dans : The National Interest 20, 1990, p. 17-23, aperçu partiel à consulter sur : https://www.jstor.org/stable/42894676.
- Voir les graphiques à ce sujet sur : https://www.finanzen.ch/devisen/chart/us-dollar-russischer-rubel-kurs.
- Voir à ce sujet, en guise d’exemple parmi les nombreuses publications, Christian Steiner : « Als Russland die schwerste Krise seit dem Ende der Sowjetunion erlebte » dans : Neue Zürcher Zeitung, 17/08/18, à lire en ligne sur : https://www.nzz.ch/wirtschaft/als-der-rubel-nicht-mehr-rollte.
- L’auteur de l’article était présent.
- Voir sur Pew Research Center : European Public Opinion Three Decades After the Fall of Communism, 15/10/19, p. 5, à consulter en ligne sur : http://docs.dpaq.de/pew-research-center-europe-report-embargoed.pdf.
- Voir illustration ci-dessous : https://www.statista.com/statistics/emigration-and-immigration-russia.
- Source : Rosinfostat : Плотность населения России по регионам и городам на квадратный километр, (Répartition et densité de la population en Russie par région et par ville, au km²) voir en ligne sur : https://rosinfostat.ru/plotnost-naseleniya. Voir à ce sujet la carte réalisée par Aleksey Glushkov (Алексей Глушков) pour Wikipédia Russie : https://ru.wikipedia.org/wiki
- Voir : https://arbeit.studiumineuropa.eu/Europaischen-Landern-Amtssprachen-Einwohnerzahl-Hauptstadt-Wahrung-Telefonvorwahl-Internet.
- Voir : Wissenschaftliche Dienste des Deutschen Bundestags : Les minorités russes dans les pays baltes, état des lieux, WD 2 – 3000 – 02/17, 24/02/17, à consulter en ligne sur : https://www.bundestag.de/resource/pdf-data.pdf. Parmi les nombreuses publications à ce sujet : Aufstand der « Nichtbürger » in Lettland sur Deutschlandfunk Kultur, 25/04/14, à consulter en ligne sur : https://www.deutschlandfunkkultur.de/baltikum-aufstand-der-nichtbuerger-in-lettland et : « Nichtbürger » in Estland und Lettland, Angst vor der russischen Minderheit sur l’édition Etranger du Spiegel, 03/10/17, à lire en ligne sur : https://www.spiegel.de/estland-und-lettland-das-problem-mit-der-russischen-minderheit-a.