Faut-il continuer à envoyer des astronautes dans l’espace ? La communauté scientifique n’est plus si sûre
Tech & Futurs23/09/2025 07:00
Faut-il continuer à envoyer des astronautes dans l’espace ? La communauté scientifique n’est plus si sûre
Alors que la Nasa doit faire des annonces sur l’avancement du vol Artemis II, l’intérêt même du programme pose question.
SOURCE Par Sarafina Spautz
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ESPACE - Lorsqu’on pense conquête spatiale, on pense surtout à la mission Apollo 11 et ces images de Neil Armstrong, premier humain à poser le pied sur la Lune, le 21 juillet 1969. Mais trois ans plus tard, le programme est abandonné. Il faudra attendre Donald Trump pour qu’un véritable projet de retour sur la Lune voit à nouveau le jour : le programme Artemis pour lequel la Nasa doit donner de nouvelles précisions ce mardi 23 septembre.
Par rapport aux années 60, une différence notable saute aux yeux. Cette fois, l’objectif n’est pas seulement d’aller sur le satellite naturel de la Terre, mais d’y rester, avant pourquoi pas d’aller un jour vers Mars. Mais l’intérêt d’envoyer des astronautes dans l’espace divise la communauté scientifique spécialisée dans l’espace, notamment en raison de son coût.
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Prenons l’exemple de Thomas Pesquet, astronaute français le plus connu qui s’est rendu déjà deux fois à bord de la Station spatiale internationale (ISS). Mais qu’est-ce qu’il y fait concrètement ? « L’ISS est un laboratoire scientifique en micropesanteur. Et donc à ce titre, on envoie des astronautes pour deux raisons : soit pour être opérateur, ce sont les yeux et les mains des scientifiques. Et l’autre raison, c’est qu’ils sont aussi eux-mêmes sujets, notamment en physiologie humaine », explique au HuffPost Rémi Canton, chef de projet vol habité, Centre national d’études spatiales (CNES).
Des expériences trop chères pour ce qu’elles sont ?
Mais pour Irénée Régnauld, co-auteur du livre Une histoire de la conquête spatiale (ed. La fabrique), utiliser des astronautes pour réaliser des expériences scientifiques à bord de l’ISS n’a pas de sens : « La moindre expérience scientifique dans l’espace coûte plusieurs dizaines de millions d’euros si on la rapporte au coût total et au nombre d’heures passées en orbite, il n’y a pas vraiment d’intérêt scientifique », déclare-t-il au HuffPost.
Il fustige notamment le discours autour des recherches sur certaines maladies comme l’ostéoporose et les découvertes que l’on pourrait y faire en observant le corps des astronautes dans l’espace : « Si on mettait cet argent directement dans l’ostéoporose sur Terre, ça serait beaucoup plus efficace », avance-t-il.
Irénée Regnauld estime que l’objectif d’envoyer des astronautes dans l’espace est plus géopolitique qu’autre chose : « On va dans l’espace pour comprendre comment on peut continuer à y rester. On fabrique des modules qui permettent d’habiter l’espace. Mais c’est quasiment une fin en soi en fait. Et j’ai envie de dire, c’est un secret de polichinelle dans le spatial, on ne fait pas du vol habité pour la science, ce n’est pas ça, c’est une forme de démonstration technologique, même de suprématie symbolique ».
Des vols habités au détriment de la science ?
Alors que la fin de l’exploitation de l’ISS est prévue d’ici 2030, le prochain objectif des agences spatiales se porte de nouveau sur la Lune. Mais ce choix d’y expédier des humains est avant tout géopolitique.
Le but est d’utiliser la Lune comme terrain d’entraînement avant d’aller sur Mars, et surtout pour les Américains, l’enjeu est d’y arriver avant la Chine. Néanmoins, il reste un problème, c’est que privilégier le vol habité a aussi un impact sur la science.
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« On le voit depuis le début de l’année 2025 avec l’administration Trump. On a une relance de l’épopée martienne, lunaire, etc. Alors que la NASA se voit supprimer un nombre impressionnant de budgets sur les sciences climatiques, sur l’exploration des astres », rappelle Irénée Régnauld.
En attendant, le programme Artemis accumule les retards. La mission qui prévoyait de voir de nouveau des humains fouler le sol lunaire, initialement prévue en 2025 a été décalée à 2027. Et celle-ci pourrait encore être reportée, car la fusée Starship d’Elon Musk qui doit être utilisée n’est pas encore prête. Quant à la Chine, elle prévoit d’y envoyer ses taïkonautes d’ici 2030.
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