EDITORIAL
Hervé, nous avons toujours voulu te ressembler
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Par Madiambal Diagne,
Président international de l’UPF
Hervé Bourges a tiré sa révérence à l’âge de 86 ans, après une vie bien remplie. Il avait encore sa place parmi nous, comme on le dit quelque part en Afrique, à la perte d’un être cher. Ses amis et proches lui ont rendu hommage, le Lundi 2 mars 2020, à l’Eglise Saint Eustache de Paris. Méticuleux et avec sa légendaire délicatesse, Hervé Bourges avait réglé par avance chaque détail de la cérémonie d’adieu. Hervé (la plupart d’entre nous l’apostrophaient ainsi) a organisé ses obsèques et a souhaité se voir entouré par les siens. Il a tenu à y faire une grande place à l’Union internationale de la Presse francophone (UPF) dont il a assumé les fonctions de Président international de 2001 à 2007. J’y étais en compagnie de Jean Kouchner, Vice-Président international de l’UPF.
Ces dernières années, Hervé était devenu rare à nos manifestations, mais tenait à chaque fois à nous envoyer un message d’amitié. J’avais beaucoup insisté pour le déplacer jusqu’à Yaoundé à l’occasion de nos 48èmes Assises de novembre dernier. Mais les médecins lui conseillaient, depuis quelques années, d’éviter les longs voyages par avion. Malicieux, Hervé avait bien deviné que nous cherchions à lui rendre hommage, «chez lui» en Afrique et au Cameroun particulièrement. Il n’était donc pas venu à Yaoundé mais il avait été l’absent le plus présent de nos dernières Assises.
Hervé le maître…
Ils sont nombreux, les journalistes africains à être redevables à Hervé Bourges, leur maître. Hervé Bourges avait fondé l’Ecole supérieure internationale de journalisme de Yaoundé, qui a formé des générations de journalistes de beaucoup de pays africains. Cette école fête cette année son cinquantième anniversaire. Hervé Bourges savait donc qu’il était bien attendu au Cameroun, mais il avait décliné l’invitation par une métaphore bien de ce pays, indiquant que «le vieil éléphant s’éloigne de la troupe…».
Hervé Bourges a aussi entouré de son expertise le développement du Centre d’études des sciences et techniques de l’information (Cesti) de Dakar (Sénégal). Il a été un modèle de rigueur professionnelle pour ses innombrables disciples. Chaque pan de sa vie est une leçon de vie et d’humanité. Il n’était pas qu’un «amoureux de l’Afrique», il était un véritable africain. Hervé Bourges avait activement lutté pour la décolonisation de l’Afrique et prôné l’égalité des peuples. La meilleure preuve aura été qu’il avait pris la nationalité d’un pays africain, l’Algérie, qui a arraché son indépendance après une âpre lutte.
Hervé Bourges savait élever ses interlocuteurs à sa hauteur. En 2006 à Bucarest, il était assez contrarié à l’occasion d’une session du Comité international de l’UPF. Le Président international de notre organisation qu’il était, n’avait pas supporté un traitement discriminatoire dans la prise en charge de participants aux 38èmes Assises en Roumanie. Hervé Bourges avait concédé sa réélection à la tête de l’UPF, avec la décision irréversible de passer le flambeau aux Assises suivantes à Abidjan.
Cet homme, farouchement rétif à toute forme d’injustice, me rappela cette anecdote en novembre 2014, à Dakar, quand je venais d’être élu Président international de l’UPF. Hervé Bourges avait renoué avec les Assises de l’UPF à cette occasion. Il était également porteur d’un message personnel du Président Abdou Diouf en direction des participants de ces Assises de Dakar. Abdou Diouf, ancien président de la République du Sénégal, terminait son troisième mandat à la tête de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Hervé Bourges me distilla avec un brin d’humour : « Jeune homme, tu as maintenant une bonne occasion de faire justice envers tout le monde. C’est un nouveau départ pour l’UPF. L’Afrique sera une chance pour cette organisation. Je ne suis pas sûr que ce sera compris de tout le monde, mais enfin… Ce ne sera pas simple, tu dois le savoir ». Je lui répondis : «Cher Hervé, en toute occasion nous voudrons te ressembler.»
Le rôle d’Hervé Bourges et son investissement personnel dans la vie de l’UPF ont jeté les bases de notre développement actuel. Intransigeant sur les principes d’ouverture et de démocratie, il s’est dépensé sans compter pour aider au développement de médias francophones pluriels. Défenseur acharné de la liberté de la presse et de la formation des journalistes, il laisse une empreinte inaltérable.
…tu continueras de nous inspirer
Chaque étape de la vie et du parcours d’Hervé est source d’enseignement. A l’annonce de son décès, chaque membre de l’UPF avait tenu à saluer la mémoire de ce «Grand Monsieur». D’aucuns ont salué le formateur, d’autres ont salué le camarade, d’autres encore ont salué la mémoire du collègue, du patron emphatique, du visionnaire. Mais aussi, tout le monde a retenu de lui l’image d’un infatigable défenseur et promoteur de la Francophonie. Hervé Bourges a été porte-parole et directeur de l’Information de l’Unesco, Directeur général de Radio France Internationale, P-DG de TF1, de RMC, de France-Télévisions, Président du Conseil supérieur de l’audiovisuel en France, Haut témoin de la Francophonie aux Jeux Olympiques.
A Monaco, le président de la section UPF, Patrice Zehr, témoigne : «Hervé Bourges avait été mon patron à RMC et m’avait confié la revue de presse du matin sans jamais intervenir. Je l’ai ensuite croisé à Africa numéro 1 au Gabon. J’en garde le souvenir d’un pro engagé et sachant vivre. C’était lui. Condoléances pour ce grand témoin de la Francophonie.» En Guadeloupe, Jean-Claude Rodes, vice-président international de UPF, garde en souvenir une conférence donnée par Hervé Bourges sur son «ami Franz Fanon», dans la ville de Basse-Terre. En Croatie, Silvija Luks nous écrit : «Il y a 16 ans que Monsieur Bourges avait initié la fondation de l’UPF en Croatie, et pour nous il restera pour toujours un père irremplaçable. Malheureusement, son initiative à l’Unesco d’accorder aux journalistes du monde un passeport semi-diplomatique n’a jamais vu le jour.»
En Hongrie, Eva Vamos a partagé la dédicace que Hervé Bourges lui avait faite sur son livre «Pardon my French» et on y lit : «Pour Madame Eva Vamos de la Section UPF-Hongrie, à une Union francophone exemple pour ceux qui négligent notre langue commune.» Aimé Robert Bihina souligne que «le Cameroun porte le deuil. Tous les organes de presse ont rendu hommage à un monument qui a tant fait pour le Cameroun. Car c’est Hervé Bourges qui avait fondé la première école de journalisme du Cameroun. L’amphi Hervé Bourges de cette école est la marque de la reconnaissance quasi éternelle à une icône qui a formé et inspiré plusieurs générations de journalistes camerounais. Hervé Bourges, ardent défenseur de la langue française aura laissé une empreinte indélébile au Cameroun».
En Guyane, Frantz Montauban dit : «Toute la Guyane salue la mémoire de cette personnalité qui a marqué des générations de journalistes bien au-delà du milieu francophone.» En France, Jean Kouchner écrit : «Je me souviens de chacune de nos conversations, de l’attention qu’il portait au développement de l’UPF, de ses connaissances pointues sur l’Afrique et de ses qualités pédagogiques lorsqu’il me conseillait, alors que je partais enseigner à l’école de journalisme de Yaoundé qu’il avait fondée et dirigée. Un grand homme de presse, un grand homme tout court.» A Brazzaville, Gaston Elbin Enkari s’incline devant la mémoire de «ce grand Monsieur».
Hervé, toute ta grande famille UPF s’incline devant ta dépouille. Tous les amis te saluent de Martinique, de France, du Sénégal, de Suisse, du Bénin, du Tchad, du Burkina Faso, du Mali, du Cameroun, de Belgique, d’Egypte, de Moldavie, du Québec, du Niger, du Ghana, de Thaïlande, d’Algérie, de Roumanie, d’Albanie, de Haïti, de Côte d’Ivoire, du Monténégro, de Géorgie, du Liban, de Hongrie, de Croatie, de Serbie, d’Espagne, du Gabon, d’Arménie, des Etats-Unis d’Amérique, de Mauritanie, de Madagascar, de Guinée, d’Italie, de Monaco, de Bulgarie, de Centrafrique, du Congo, du Japon, de Djibouti, de la Vallée d’Aoste, du Maroc, de Corée du Sud, du Vietnam, de Tunisie, du Cap-Vert, des Emirats arabes unis, du Togo, de Chine, de la République démocratique du Congo, des Seychelles, de la Réunion, d’Ethiopie, d’Angola, de Guinée équatoriale, des Comores.
Hervé Bourges nous a quittés en cette année anniversaire des 70 ans de l’UPF. Sa mémoire restera vive. Repose en paix, cher ami !
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LA VIE DE L'UPF
Vallé d'Aoste : Lorsqu'un concours révèle des vocations et inculque les valeurs du partage ! |
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Afin d'encourager les jeunes à écrire en français, la Section UPF de la Vallée d'Aoste organise,, depuis le début des années 90, un concours adressé aux élèves des écoles et aux jeunes de la région.
Le Concours de Trèves a également pour vocation de favoriser la pratique du journalisme en langue française en direction des plus jeunes en Vallée d'Aoste dont le premier prix offre au lauréat la possibilité de faire un stage professionnel dans la rédaction d'un média tous frais payés, grâce à une bourse d'études. Selon ses promoteurs, ce concours « offre l’opportunité unique pour la jeunesse valdôtaine de se familiariser avec la langue française ». Il est structuré sur plusieurs niveaux. Le premier s’adresse aux écoles moyennes et consiste en l’écriture d’un texte sur un thème qui varie chaque année en fonction de l’actualité du moment. Les plus méritants se voient remettre des prix en livres et récemment aussi une tablette numérique. Le deuxième niveau cible les jeunes âgés de 18 à 30 ans. Dans ce cas aussi, le thème change d’année en année et les prix sont des plus variés. Mais le premier prix a une valeur toute particulière puisqu’il s’agit de la possibilité d’effectuer un stage professionnel en immersion au sein de la rédaction d’un médiafrancophone, avec une bourse d’une valeur de 2 500 euros couvrant les frais de déplacement, de logement et de nourriture sur place, traditionnellement en France ou en Suisse. Le stage a représenté une expérience de toute première importance dans le parcours professionnel de ces jeunes.
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La première fois qu’ils quittaient le parcours académique de l’école et le cocon familial pour être livrés à « eux-mêmes ». Et la première fois, ça ne s’oublie pas, ça reste gravé dans la mémoire pour la vie. D’aucuns découvriront ainsi une passion et réaliseront que l’écriture d’un thème à l’école n’a pas grand-chose à voir avec la rédaction d’un article sur un fait d’actualité. Ils en feront leur métier. D’autres ne continueront pas dans la filière médias/communication mais cette première expérience professionnelle les marquera et leur permettra d’être plus aguerris par la suite. Quoi qu’il en soit, au sortir de l’adolescence, le stage professionnel du concours Trèves représente une opportunité unique de rentrer par la grande porte dans le monde adulte.
Cette année, l’UPF-Vallée d’Aoste fête les 20 ans du stage professionnel (qui a démarré une année après la création du concours Trèves). Pour marquer l’événement, l’UPF-Valée d’Aoste a publié un livret qui rassemble les témoignages de la plupart des gagnants du premier prix et a produit un reportage qui sera diffusé sur le site web de la section (www.upfvda.org) et sur sa chaîne You Tube. Enfin, si l’Union internationale de la Presse francophone - Section de la Vallée d’Aoste peut promouvoir l’organisation de ce stage, c’est aussi et surtout grâce à la collaboration morale et économique du Conseil de la Vallée, des Assessorats régionaux compétents en matière d’éducation et de biens culturels, de l’Université de la Vallée d’Aoste et du Centre d’études Abbé Trèves. Sans ces soutiens institutionnels, le concours Trèves n’aurait pas pu perdurer et croître tout au long de ces années.
Grâce à ces soutiens, les organisateurs promettent une édition 2020, qui sera lancée ce mois de mars, dans une forme rénovée et modernisée où la formation à l’image et aux nouveaux médias occuperont une place prépondérante.
Joseph Péaquin, Président de l’UPF-Vallée d’Aoste
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Communiqué :
UPF Maroc se forme au journalisme de solutions
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L’UPF-Maroc continue son cycle de formation lancé en décembre. C’est ainsi que la section organisait, Mardi 3 mars à Casablanca, une session intitulée «Se lancer dans le journalisme de solutions». Elle a été animée par Nina Fasciaux, Journaliste et ambassadrice en Europe du Solutions Journalism Network, basé à New York.
Les participants ont pu comprendre ce qu’est le journalisme de solutions et ce qu’il n’est pas et travailler à la réalisation d’un sujet orienté solutions grâce à une série d’exercices en groupes. Nina Fasciaux a déroulé les critères d’une couverture rigoureuse et convaincante des réponses apportées aux problèmes
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de société, précisant que le journalisme de solutions n’a pas pour but de faire taire les problèmes, mais plutôt d’offrir une vision plus complète de la réalité.
Ce cycle de formation qui a démarré avec une session sur les Podcasts, suivie d’une autre sur les Fake News et le Fact Checking, est organisé avec le soutien du Service de Coopération et d’Action culturelle de l’Ambassade de France au Maroc. La prochaine formation aura lieu en avril et portera sur le reportage mobile.
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UPF Tunisie et IPSI signent une convention de partenariat
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L’UPF-Tunisie vient de signer une convention avec l’Institut de Presse et des Sciences de l’Information (IPSI). C’était lors de la conférence organisée conjointement le 3 mars dernier à l’IPSI, sur le thème « Enseignement du journalisme francophone : Difficultés et perspectives ».
En vertu de cette convention, l’UPF Tunisie animera un club de la presse francophone à l’IPSI, adressé aux étudiants. L’IPSI sera de son côté partenaire avec la Section Tunisie de l’UPF dans l’organisation des prochaines Assises en décembre à Tunis et se chargera de produire le journal quotidien des Assises.
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La conférence a vu la participation de professeurs de l’IPSI et des membres de l’UPF Tunisie qui sont intervenus sur les enjeux de l’enseignement du journalisme francophone par rapport au marché du travail, l’ouverture de l’université tunisienne sur les écoles francophones du journalisme dans le monde et le rôle des organisations professionnelles dans la promotion du journalisme francophone.
Le débat a porté sur les difficultés rencontrées par les professeurs à enseigner en langue française, vu que les étudiants ne veulent pas faire un effort d’écrire dans une langue différente de leur langue maternelle. Les différents intervenants ont souligné l’importance d’écrire en français, dans l’ouverture de nouvelles perspectives pour les étudiants, en matière d’études à l’étranger ou en matière d’opportunités professionnelles plus tard, surtout que le marché tunisien est très demandeur de journalistes francophones.
L’Institut Français de Tunisie (IFT) était présent lors de cette conférence et a promis d’appuyer le nouveau partenariat entre l’UPF – Tunisie et l’IPSI.
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Chronique de Pierre Ganz : A propos d'un témoin assassiné
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Un éleveur malien assassiné en février par des djihadistes avait témoigné à visage découvert sur France 24. Il n’y a pas forcément de lien de cause à effet entre son interview et sa mort. Mais on ne peut nier que la protection des sources a été mise à mal dans cette affaire.
Décembre 2019. Une équipe de France 24 accompagne pendant une semaine une patrouille de la force « Barkhane » déployée par la France au Mali. Dans un village de la région du Gourma, elle filme un échange entre les soldats et des villageois de Léléhoy. L’un des éleveurs rencontré accepte un bref interview. Le 13 janvier, le reportage est diffusé par la chaîne internationale. Sadou Yehia y apparaît en gros plan et témoigne de la présence de militants extrémistes armés dans les environs. Le 5 février, des hommes armés pénètrent dans le village de Léléhoy. Selon les témoignages de ses proches, ils cherchent nommément Sadou Yehia. Il est enlevé puis ramené trois jours plus tard dans son village et exécuté sous les yeux de ses voisins. Dans toute la sous-région sahélienne, sa mort provoque un mouvement d’indignation sur les réseaux sociaux. Des messages en rendent France 24 responsable. A Paris, l’affaire provoque des interrogations dans la rédaction. Les syndicats demandent des explications à la direction de la chaîne. France 24 dit dans un long communiqué son émotion, écrivant « nous sommes profondément atteints par cet assassinat barbare ». Mais nie en être en quoi que ce soit responsable. La chaîne explique que « rien ne permet d’affirmer que le floutage de Sadou Yehia lui aurait garanti une quelconque sécurité». Elle invoque un contexte dans lequel les groupes terroristes son mêlés aux populations et savent parfaitement qui parle à qui. Elle cite les chiffres de l’ONG Human Right Watch qui a décompté 4000 assassinats de notables au Mali en 5 ans, et 200 dans les trois derniers mois de 2019. Pour France 24, « l’anonymisation est illusoire » Ces données sont réelles, ce contexte existe. On ne peut affirmer que Sadou Yehia a été tué parce que France 24 l’avait mis en lumière ou dire qu’elle serait complice voire coupable de cette exécution comme on l’a lu sur les réseaux sociaux. Mais cela n’exonère pas France 24 de sa faute déontologique. Dans ce reportage, des précautions multiples
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sont prises pour préserver les témoins. Les militaires français ne sont désignés que par leur prénom. Ils s’appellent capitaine Quentin, sergent John, capitaine Julien ou capitaine Romain. Une précaution qui vise à protéger leurs familles d’actes de terrorisme sur le sol français - on notera que curieusement l’officier malien interviewé est désigné par son grade, son prénom et son nom; sa famille aussi pourtant pourrait être l’objet de vengeances. Toujours dans ce reportage, l’anonymat d’une femme filmée sortant de sa case est protégé par le floutage de son visage. France 24 le justifie par le fait qu’elle est filmée « à son insu », alors que les notables montrés brièvement un peu plus tard et surtout Sadou Yehia, interrogé face caméra, savent qu’ils sont filmés et donc ne sont pas floutés. Cette distinction est dangereuse. La responsabilité des journalistes ne s’arrête pas à vérifier que les personnes filmées ont identifié la caméra. Elle est de protéger les sources, et notamment les témoins vulnérables. C’est par exemple s’assurer que son interlocuteur a compris que ses propos seront rendus public et que cette diffusion pourrait avoir des conséquences (et ne les publier qu'avec son consentement éclairé). Et lorsque quelqu’un qui accepte de témoigner court de ce fait un risque physique grave, le journaliste doit lui proposer l’anonymat. Changer son nom, et le dire, ne pas donner d’indications qui permettent de le localiser. Le filmer en ombre chinoise, ou de dos, ou selon un cadrage qui le rend impossible à identifier. Si cela n’est pas fait sur le terrain, la post production permet à froid de se poser des questions sur la sécurité de ceux sur lesquels on va attirer l’attention et de les protéger si cela semble nécessaire, en tout cas d’éviter d’accroître les risques qu’ils courent. Un principe de précaution existe aussi pour protéger ses sources. Au delà même de ces règles, la connaissance approfondie de la situation dans cette région du Mali que France 24 revendique aurait du conclure à ne pas rajouter de risque aux risques existants. Certes l’anonymisation n’aurait peut-être pas sauvé Sadou Yehia. Mais cela aurait placé les notions de responsabilité éditoriale et de protection des sources au plus haut niveau. Pierre Ganz |
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Chronique de Jean-Claude Allanic : Des mots problématiques (et une sextape)
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Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?
Entendu pendant la crise du coronavirus qu'on avait prévu "des activités occupationnelles" pour les rapatriés de Chine mis en quarantaine. Comprenez : des "activités" pour les occuper. Lu aussi ce titre : "la formation des imams au cœur de la problématique". Voilà un problème bien "problématique"!
Dans le même ordre d'idées, j'ai écouté un général parler de la "permanentisation" de forces armées, ce qui doit être plus efficace qu'une présence permanente. Qu'en termes savants, ces choses-là sont dites!
Quand j'ai débuté dans la presse havraise, mon rédacteur en chef m'obligeait à écrire des phrases simples. "On n'est pas là pour briller mais pour être compris par tous les lecteurs" disait-il. Et il ajoutait que le principal outil du journaliste était un dictionnaire pour trouver le mot juste.
A force de vouloir paraître intelligent, on en arrive à écrire des choses inintelligibles. Comme dans cet article d'un magazine très branché vantant les mérites d'une nouvelle gamme de produits cosmétiques pour hommes. On y apprend que ces mâles produits de beauté abandonnent les "canons excluants et virilistes (…) des storytellings" au profit "d'une masculinité contemporaine et plurielle (…) avec une volonté d'inclusivité". En vente en ligne "ou dans les pop-up stores"!
Je n'ose dire - formule hypocrite utilisée dans toutes les langues, pour faire semblant de ne pas oser - que tout cela s'apparente de la masturbation intellectuelle. Osons donc.
Porté par un enchaînement d'idées perverses, me vient à l'esprit la
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mésaventure d'un ancien ministre français dont l'élan électoral parisien fut "interruptus" après la diffusion d'une "sextape".
J'ai apprécié l'effort des confrères qui ont évité l'anglicisme et ont parlé plutôt d'une "vidéo sexuelle". J'ai noté aussi la prudence oratoire de ceux qui ont préféré l'expression davantage pudique de "vidéo intime" .
Sexuel ou intime? Cherchez la différence. Se faire prendre en photo en pyjama dans sa cuisine est-elle une divulgation de caractère sexuel ou intime?
Dans cette histoire de "porn revenge", on attend que les "Immortels" nous fassent des propositions honnêtes pour une bonne traduction.
Tout cela de la faute d'un "artiste" russe Piotr Pavleski dont le titre de gloire fut, nous disent les médias, de se clouer les testicules sur la place rouge. L'artiste en question n'étant pas complètement fou, il a pris garde de ne pas démonétiser ses bijoux de famille. Il ne s'en est pris qu'à l'emballage, autrement dit le scrotum. Il est vrai que la différence entre testicules et scrotum n'est pas au programme des écoles de journalisme.
Certains trouvent qu'il n'y a pas de mal à se faire plaisir et d'autres qu'il y a du plaisir à se faire du mal. Fallait-il, pour autant, qualifier notre homme "d'artiste" ? Des confrères ont préféré le présenter comme un "performeur". Le mot semble plus adéquat. Pour m'en assurer, j'en ai cherché la définition sur internet. Je vous livre celle du dictionnaire en ligne Reverso : "Artiste qui pratique l'art performance".
Tout est dans tout et réciproquement !
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